Chroniques d'un Elfe Amoureux

Chapitre Premier

Ma vie autrefois n’avait rien de passionnant. Je passais mes jours à tuer quiconque croiserait mon regard aux abords des terres elfiques. Pourtant ce jour là il est un regard qui ne m’a pas laissé indifférent. Un de ces regards qui sans que l’on ne puisse rien faire vous fait baisser les yeux et colore vos joues d’une lueur rosée … Oui je l’avoue, en ce doux matin de printemps, impuissant je me suis senti rougir face à la frêle créature que j’ai eu le bonheur de croiser.
Mais cette fragilité n’était qu’éphémère : à peine m’avait-elle sourit qu’elle s’en était allée, épée à la main, pour chasser aux côtés d’autres elfes. Qu’il est agréable de voir que de nos jours les elfettes ne sont pas toutes de simples soigneuses et que parmi ces jeunes femmes les combattantes sont chaque année plus nombreuses, et plus belles …
Je suis resté quelques minutes à contempler le spectacle qui s’offrait à moi, assis le dos contre un arbre, caressant du bout des doigts l’herbe fraîche comme j’aurais pu caresser inlassablement ses cheveux. Mais reprenant mes esprits peu à peu je me suis rendu compte qu’elle et ses compagnons n’étaient plus là. Aussi au plus profond de moi je me posais des questions : « Peut-être la reverrais-je un jour, en tout cas je l’espère … Qui sait peut-être même aurais-je l’occasion de lui adresser la parole ».

Chapitre Second

Les monstres se faisaient de plus en plus rares sur les terres que je protègeais. Moi qui désirais fonder un nouveau clan un jour, suite à mon départ de chez les Asraïs, j'aurais fait un bien piètre chef si je n’avais pu correctement nourrir les membres combattant à mes côtés. Tandis que je m’était résigné à ne manger plus que des fruits et des racines, attendant l’arrivée d’un quelconque gibier, j’ai eu à ma plus grande joie, la chance de recroiser l’elfette aperçue une semaine auparavant. Ô combien de fois son regard bleuté, à la splendeur inégalable avait pu hanter mes nuits si agréablement ? Bien qu’hésitant je me suis décidé d’aller à sa rencontre alors que celle-ci revenait des sources, à en juger par les seaux d’eau qu’elle portait.
« Laissez-moi vous aider à porter ces fardeaux » lui ai-je dit, gêné et rougissant comme la dernière fois. Un sourire amical s’est dessiné sur ses lèvres et j’ai sentit dans son regard une lueur de satisfaction, laquelle n’a pas été longue à comprendre une fois l’elfette ayant accepté mon aide : La belle aurait pu se rompre le dos tant ces seaux étaient lourds !
Nous avons marché en direction de chez elle, tous deux silencieux, elle paraissant ailleurs et moi ne sachant quoi dire. Après un bon quart d’heure de marche nous sommes enfin arrivés aux abords de la prairie au centre de laquelle se trouvait sa maison au toit de chaume. Aussi était-il temps pour moi de la laisser à ses occupations. D’un hochement de tête elle dit :
« Mon nom est Azora, merci encore noble …
- Lliewelynn » lui répondis-je avant de lui sourire pour enfin m’en aller, le cœur léger, bien que ne connaissant que son nom et le son de sa voix, si douce.

Chapitre Trois

Quelques jours passèrent depuis ma dernière rencontre avec Azora. Croulant sous les responsabilités, car ayant enfin eu la chance de fonder la Guilde des elfes Sylvains, son nom aurait sombré dans l’oubli si je ne l’avais pas revue ce jour là. Poursuivie par un Golem, auquel elle avait essayé de prendre quelques pierres précieuses pour se confectionner un collier, la belle m’a-t-elle dit, s’était foulée la cheville en courant. Quelle chance que je sois passé là à cet instant, recrutant aux abords du royaume elfique. Aussi ai-je combattu dignement, pour éloigner la bête mettant hors de danger la délicieuse Azora. Une fois fait je me suis rendu aux côtés de l’elfette, afin de lui appliquer un bandage tandis que celle-ci me faisait part de sa reconnaissance. Comme ce fut gênant mais gratifiant sur le coup d’avoir eu le privilège de porter secours à la jeune fille qui assurément ne me laissait pas indifférent …
Je l’ai aidée à se relever puis lui ai tendu mon bras, pour qu’elle s’aide de celui-ci afin de marcher sans trop se faire mal alors que je la guidais en direction de chez elle. Nous avons quelque peu bavardé en route, en profitant pour en apprendre un peu plus l’un de l’autre. Arrivés à sa maison je lui ai souhaité un bon rétablissement, en espérant au plus profond de moi que nous puissions nous revoir une prochaine fois. A mon grand étonnement elle me remercia, pour ensuite me proposer d’aller chasser ensemble le lendemain, requête qui fut bien sûr tout de suite acceptée.
Ainsi m’en suis-je allé, attendant patiemment la prochaine aurore, lors de laquelle j’irais lui rendre visite.

Chapitre Quatre

Qu’il est agréable de chasser au petit matin, dans le calme le plus total, n’ayant pour seule mélodie que le bruissement des feuilles remuées par le vent et perlées d’une goutte de rosée.
L’idée de chasser aux côtés de l’elfette m’enchantait à un tel point que je me suis permis ce matin là d’aller la voir un peu plus tôt sans qu’elle ne puisse s’en apercevoir, attendant sa venue sur le pallier de sa maison, respirant agréablement son parfum si frais et délicat. Voilà bien longtemps me dis-je, que je n’avais plus partagé de bons moments aux côtés d’une femme, ne serait-ce qu’en chassant à ses côtés ...
Une voix cristalline me fit sortir de mes pensées, aussi un sourire au coin des lèvres je pus voir qu’Azora venait de sortir, me saluant respectueusement, s’inclinant légèrement. Ô comme elle fut mignonne à cet instant – bien qu’elle le soit constamment à mes yeux – ce sourire malicieux qui s’était dessiné sur son visage me fit presque oublier que j’avais un petit quelque chose pour elle. Aussi ai-je sorti de la poche de ma veste une rose rouge, que j’ai alors tendue à la belle, laquelle accepta la fleur pour la glisser dans ses cheveux, me remerciant d’un sourire. Après cela nous sommes allés aux frontières ouest, marquant la limite entre les terres elfiques et les terres taurennes, Azora m’ayant dit qu’elle aimait y chasser … de la vachette. C’est avec amusement que je lui ai répondu, dégainant ma lame, que je les chasserais avec plaisir à ses côtés.
Sa splendeur au combat m’impressionna sur le coup, elle qui était si fine et paraissait si fragile, elle se montra plus résistante et combative que bon nombre de guerriers que je connaissais. Et puis je dois bien l’avouer : la voir onduler, se battant de tout son cœur, de tout son corps aux allures félines ne put que me charmer ! Qu’elle fut craquante à cet instant …
Aussi avons-nous passé notre matinée, chacun apprivoisant l’autre dans un combat sans fin. Mais voilà, il me fallait m’en aller pour rejoindre mon clan, encore tout jeune et plein d’avenir à l’époque, mais qui aujourd’hui a sombré dans l’oubli. Ce fut un fondateur pensif que purent voir ce jour là les elfes de Brocéliande.
Je me rappelle encore de chacun de leur sourire à mon arrivée …

» Pour toi, mon elfe...
» Eldarion, l'elfe maudit